Pour consolider la réserve civile de la police nationale, l’argent ne suffira pas
«Le job des policiers comme des gendarmes, c’est d’être sur le terrain ! » clame Jean-Michel Fauvergue, député LREM et ancien patron du Raid. Pour les recentrer sur leur cœur de métier, le recours à la réserve civile est une piste.
Fondée en 2003, celle de la police nationale était initialement constituée de fonctionnaires retraités, mais depuis 2011, tous les citoyens de 18 à 65 ans peuvent la rejoindre, après une sélection, et dans la limite de 90 jours par an renouvelables.
Entre 2016 et 2017, l’effectif a augmenté de 32%, et s’élevait, en septembre 2017, à 11 900. Bien en deçà de ce qu’on observe dans la gendarmerie : créée en 2006, sa réserve civile compte 30 000 personnes. Son budget 2018 est de 98,7 millions d’euros… contre 39 millions d’euros pour la réserve de la police nationale.
Un budget revu à la hausse
À la peine, cette dernière a récemment reçu le soutien du gouvernement. « Quand on a la chance de pouvoir compter sur des policiers formés aux situations les plus extrêmes, on ne saurait épuiser cette richesse en missions pour lesquelles l’expertise de la police n’est pas indispensable », avançait ainsi Gérard Collomb, le ministre de l’Intérieur, lors de la cérémonie des vœux de la police nationale, en janvier.
« Nous pensons que c’est extrêmement important de pouvoir libérer un certain nombre de nos policiers [de tâches annexes] », renchérissait-il à l’Assemblée pour justifier la hausse de 7 millions d’euros du budget (de 32 à 39 millions d’euros) de la réserve civile de la police nationale, décidée dans la loi de finance 2018, avec un objectif de 5 000 réservistes supplémentaires en 2018.
Des missions peu attractives
Problème, « contrairement à la gendarmerie, qui dispose d’une réserve civile qu’elle est en capacité de former, la police nationale ne peut en faire autant, faute de budget et de structures de formation. Les rares volontaires sont donc confinés dans des tâches monotones et peu attractives, et ce sont les policiers eux-mêmes qui assurent toutes les missions, y compris l’encadrement des manifestations, notamment sportives et culturelles », déplore le député Laurent Garcia (Modem).
La gendarmerie offre à ses réservistes des missions intéressantes
Au contraire, la gendarmerie offre à ses réservistes des missions intéressantes, telles que le maintien de l’ordre à Saint-Barthélemy et Saint-Martin après le passage de l’ouragan Irma, confié à trois escadrons de gendarmerie mobile constitués de réservistes.
« Il faut que les décideurs de la police nationale proposent des postes plus attractifs, avance Jean-Michel Fauvergue. C’est possible : je l’ai vu pendant l’organisation de l’Euro [de football, en 2016], à laquelle la réserve statutaire [soit les fonctionnaires retraités] aurait pu être associée, en rappelant, par exemple, des anciens du Raid pour tenir des postes opérationnels. »
Quant à la réserve volontaire (soit les citoyens âgés de 18 à 65 ans) « elle pourrait aussi être mobilisée sur ce qu’elle sait faire, sans obligatoirement passer par une formation. Les ingénieurs seraient très utiles dans le domaine informatique », estime l’ancien patron de l’unité d’élite.
Mais un obstacle d’importance demeure : le blocage culturel. En effet, contrairement aux gendarmes, qui appartiennent à un corps militaire, « les policiers sont imprégnés de l’idée qu’eux seuls peuvent faire leur travail, regrette Jean-Michel Fauvergue, ce qui explique la méfiance de certains d’entre eux vis-à-vis de la réserve et leurs résistances ».
Félicité de Maupeou