Afrique : La technologie numérique à l’assaut des déserts médicaux africains
Les initiatives fleurissent, mais sans qu’un modèle économique n’émerge.
En Afrique, un demi-milliard de personnes – près de la moitié de la population – utilise des services mobiles. Un phénomène fulgurant : entre 2000 et 2014, le taux de pénétration d’Internet sur ce continent est passé de 6% à 43% de la population.
Parallèlement, et malgré de récentes améliorations dans les services sanitaires, la santé d’une grande proportion d’Africains ne s’améliore toujours pas.
Deux faits qui font de l’Afrique un terrain d’expérimentation idéal pour la santé connectée. La lutte acharnée contre le virus Ebola l’illustre de façon éclatante. Les autorités sanitaires étant venues à bout de l’épidémie en traçant les foyers d’infection par l’analyse des SMS envoyés par la population.
Dépasser l’expérimentation
Concernant la santé au quotidien, les projets émergent, depuis cinq ans, dans de nombreux pays africains. À Bamako (Mali), le service de dermatologie du Centre national d’appui à la lutte contre la maladie (Cnam) a, par exemple, mis au point un catalogue de maladies de la peau, dont sont affectés 30% des Maliens. Trois mille infections ont été recensées en un an, après le lancement du programme en 2015. 175 cas complexes (lèpre, prurigo, dermatophytie, etc.) ont fait l’objet d’un télédiagnostic.
Réalisant quatre visites de terrain, les dermatologues du Cnam ont confirmé les diagnostics posés à distance. Cela a permis de valider l’approche et de l’étendre à tout le pays, en privilégiant les zones défavorisées et enclavées où une couverture Internet était disponible. Un succès remarquable car le principal écueil de ces programmes tient à la difficulté de les étendre et de dépasser le stade expérimental.
Deux difficultés de taille
Autre exemple : l’ONG de santé publique Amref (Association pour la médecine et la recherche en Afrique) a développé, au printemps 2015, un projet qui s’appuie sur l’utilisation conjointe de deux plateformes : l’une proposant la formation à distance des sages-femmes et infirmiers et l’autre, spécialisée dans la télémédecine.
Le projet déploie également une valise pour la réalisation d’examens pointus dans des zones reculées, comme des électrocardiogrammes, des échographies, etc.
« Les agents de santé disposent d’une application mobile pour faire le lien avec les structures de santé, principalement pour la collecte et le transfert de données, le rappel du calendrier vaccinal, les consultations pré et postnatales », détaille encore Henri Leblanc, délégué général de l’Amref en France.
175 télédiagnostics complexes confirmés par les visites.
Selon un bilan en date de juin 2017, le programme suit 15 000 femmes enceintes par an et près de 50 000 enfants de moins de 5 ans.
Si ces initiatives, et d’autres – menées dans le cadre de programmes nationaux, comme au Maroc ou en Côte d’Ivoire – se multiplient, la santé connectée se heurte, en Afrique comme ailleurs, à deux difficultés de taille non résolues : son financement global et l’interopérabilité des systèmes d’information.
Sylvie Fagnart