Un modèle économique se dessine enfin pour l’e-santé
La généralisation du remboursement va permettre de poser le cadre du financement de la télémédecine.
«J’avais coutume de dire : la télémédecine existe depuis quinze à vingt ans, la seule chose innovante serait de la financer », lança le député Jean-Marie Vanlerenberghe, tandis que l’Assemblée nationale s’apprêtait à voter, fin 2017, la généralisation du remboursement des principaux actes de télémédecine.
S’appuyant sur l’expérimentation, ces cinq dernières années, du remboursement de certains actes, le modèle économique français de la santé connectée repose donc sur l’Assurance Maladie. Avec une contrainte inhérente : l’absence de reste à charge pour le patient.
Le boom attendu de la télémédecine dépendra donc de l’attractivité des rémunérations proposées au corps médical pour ces actes. C’est l’enjeu de la négociation, ouverte fin janvier entre la Caisse nationale, les caisses régionales et les cinq syndicats représentatifs des médecins libéraux.
Boîte de Pandore
Ces derniers plaident pour « une rémunération réellement incitative pour les actes », comme Philippe Vermesch, président du Syndicat des médecins libéraux (SML). Ils veulent aussi profiter de cette large négociation pour valoriser certaines de leurs pratiques.
Jacques Battistoni, de MG France, propose ainsi que le téléconseil, que délivrent déjà gratuitement nombre des généralistes, soit enfin pris en compte.
Fidèles à leur ligne de conduite des dernières années, les pouvoirs publics craignent d’ouvrir la boîte de Pandore de la surconsommation de soins. Du côté de l’Assurance Maladie, la position reste donc, à l’entame de la négociation, prudemment celle d’une valorisation des actes similaires à la nomenclature générale.
« Une téléconsultation a vocation à être rémunérée comme une consultation classique », affirmait le 18 janvier à l’AFP le directeur de l’Assurance Maladie, Nicolas Revel. La ministre Agnès Buzyn a néanmoins ouvert la porte à des « incitations spécifiques », pour certains médecins et dans certains cas d’urgence.
C’est aux détails de cette nouvelle convention médicale que pourront s’apprécier les opportunités pour que l’e-santé prenne enfin son envol en France. Réponse au cours du printemps 2018, Nicolas Revel ayant annoncé son intention de voir la convention appliquée « entre l’été et la fin de l’année ».
Surcoût pour l’adhérent
Tout ce qui échappera à l’adhérent continuera à être financé par les complémentaires santé. Comme pour les applis et les innovations médicales, comme pour les tests prénataux non invasifs, ce sont elles qui ont, par exemple, permis l’essor des plateformes de téléconseil, alors que ces pratiques ne relèvent pas du décret de 2010 sur la télémédecine.
La téléconsultation prendra aussi son essor grâce aux contrats de couverture santé collective : de plus en plus de mutuelles et d’assureurs proposeront d’installer des cabines au sein même des entreprises. Avec, à la clef, un surcoût pour l’adhérent, même si, chez AXA, on assure que l’installation d’une Consult Station® H4D ne représente qu’une augmentation d’un ou deux euros par contrat.
Sylvie Fagnart
INFO +
Une téléconsultationchez un médecin de secteur 1 ou 2 coûte 25 euros.