Les collectivités face à l’entretien des lieux de culte
La sauvegarde du patrimoine religieux constitue un épineux problème : « Le principe de laïcité étant poussé à l’extrême, il peut être difficile pour les élus d’assumer les dépenses d’entretien ou de rénovation des édifices cultuels face à leurs administrés », reconnaît Alexandra Sobczak, fondatrice de l’association Urgences Patrimoine.
Résultat : début 2017, le site Patrimoine-en-blog, dédié aux patrimoines religieux, recensait 313 églises « en danger », sur les 42 258 que compte la France*. Plus précisément, une douzaine de projets de démolition serait actuellement à l’étude. Par ailleurs, une vingtaine d’églises seraient déconsacrées chaque année pour être vendues.
Vendre sous condition ?
La vente de ces édifices peut sembler une solution pour les communes désargentées. Des entreprises, des institutions ou encore des particuliers peuvent être intéressés par ce style d’achat : discothèques, sex-shop… Des garde-fous existent puisque, avant de vendre, le maire doit obtenir l’accord de l’évêque.
Mais rien n’interdit au nouveau propriétaire de revendre l’édifice qui n’est plus, à son tour, contraint par un accord de l’Eglise. C’est ainsi qu’à Angers, une chapelle est aujourd’hui une boîte de nuit.
Patrice Besse, agent immobilier spécialisé dans la vente d’édifices de caractère, conclut en moyenne cinq transactions de ce type par an : « La transformation des lieux de culte doit se faire en respectant quelques principes, plaide ce spécialiste qui souhaite qu’ils restent ouverts au public et que leur affectation soit la plus culturelle possible.Les communes doivent considérer ces transformations comme un atout économique. Dans cette logique, nous travaillons beaucoup avec des artistes, qui les aménagent en lieux d’exposition ou de spectacles. »
Vers une dotation affectée aux communes
Pourtant, des solutions de financement existent pour éviter ces décisions irréversibles. Ainsi, le Conseil de Paris a autorisé le déploiement de bâches publicitaires devant plusieurs édifices religieux majeurs (Saint-Augustin, la Madeleine et Saint-Eustache) pour en financer la rénovation.
Autre piste explorée : le recours à des bailleurs de fonds. Ainsi, la sauvegarde du patrimoine religieux mobilise plus de 74% des interventions de la Fondation du patrimoine en faveur des projets publics. L’association privée La Sauvegarde de l’art français, de son côté, se présente comme le premier mécène des églises et des chapelles de France.
Si l’église paroissiale est inscrite et classée, la commune peut aussi obtenir des fonds de la direction régionale des affaires culturelles (Drac).
Les huit associations du G8 Patrimoine voudraient aller encore plus loin. Parmi les propositions formulées en 2016 dans leur « Lettre ouverte aux Français et à leurs élus sur le patrimoine », elles préconisent de sanctuariser une dotation affectée aux communes et destinée à la préservation et à l’entretien de leur patrimoine public municipal.
Marianne Di Meo
*40 307 églises appartiennent aux communes et 1 951 aux diocèses. Inventaire de la Conférence des évêques de France 2016.
Les édifices à la charge des communes
La loi de1905 sur la séparation des églises et de l’État édicte que les édifices religieux (églises, temples, synagogues, etc.), construits avant cette date, appartiennent à l’État, aux départements et aux communes. À ce titre, les collectivités doivent prendre en charge les dépenses nécessaires à leur entretien, à leur conservation et à leur réparation.