La fin de la braderie des biens de l’État
Tous les rapports publics arrivent aux mêmes conclusions. Les cessions de biens immobiliers exigent davantage de transparence et de professionnalisme de la part des services de l’État.
Comment justifier que le site historique de l’imprimerie nationale, à Paris, ait été vendu au fonds d’investissement américain Carlyle pour 85 millions d’euros en 2004, avant d’être racheté, quatre ans plus tard, par le ministère des Affaires étrangères pour 376,7 millions d’euros ? Comment expliquer que le palais Clam-Gallas de Vienne, siège de l’Institut français d’Autriche, ait été cédé au Qatar en 2015, sans qu’aucun appel d’offres ait été lancé ?
Les biens cédés par l’État réclament une professionnalisation des services.
La Cour des comptes avait examiné, il y a quelques années, un échantillon de vingt transactions immobilières supérieures à 2 millions d’euros. Le bilan était sans appel : neuf d’entre elles présentaient des « singularités dans le déroulement de la procédure de cession ». Un doux euphémisme pour désigner de graves dysfonctionnements : réduction du prix acquitté par l’acquéreur, conditions de vente discutables, etc.
Insertion de clauses d’intéressement aux plus-values
Pour rester crédibles, les services de l’État doivent donc faire preuve de davantage de rigueur. Des leçons ont déjà été tirées du passé. Les ventes immobilières de l’État sont, par exemple, depuis 2008, assorties d’une clause d’intéressement aux plus-values. Dès lors, en cas de revente, dans un délai de deux ans, pour un prix supérieur à celui stipulé dans l’acte notarié, l’acquéreur doit verser à l’État un intéressement qui peut atteindre jusqu’à 50% de la plus-value réalisée.
Malgré cela, il existe encore une marge de progrès, notamment en ce qui concerne les compétences des personnels de la Direction de l’immobilier de l’État, qui a remplacé France Domaine en septembre 2016. Pour l’Inspection générale des finances, « l’amélioration de la commercialisation des biens cédés par l’État passe par la professionnalisation, ainsi que par l’évolution d’une culture traditionnellement administrative et juridique à une approche plus commerciale ».
Le modèle britannique, où la logique de marketing et l’utilisation de pratiques d’agences immobilières par les autorités publiques sont courantes, pourrait servir d’exemple à suivre. Par ailleurs, dans un souci de transparence et d’efficacité, ne serait-il pas souhaitable que des acteurs privés de l’immobilier interviennent pour évaluer et vendre ces biens publics ?
Marianne Di Meo
Le processus de vente
Les biens sont proposés en premier lieu aux collectivités locales, qui ont un droit prioritaire. Si elles ne l’exercent pas dans un délai de deux mois, ils peuvent être achetés par des personnes privées dans le cadre d’appels d’offres ou d’adjudications, c’est-à-dire des ventes aux enchères publiques. L’État vend ses biens à la valeur du marché, mais l’estimation qu’il retient n’est pas communiquée pour ne pas influencer le prix des propositions. Le bien est cédé au plus offrant.