« Tous les financements étant absorbés par le bâti, les alternatives à la prison sont de faible qualité »
Marie Crétenot, responsable du plaidoyer à l’Observatoire international des prisons (OIP)
Pourquoi remettez-vous en question la prison ?
Car elle est vide de sens, notamment pour les courtes peines. Elle n’a pas d’impact dissuasif et désocialise. 63% des personnes sortant de prison sans aménagement sont de nouveau condamnées dans les cinq années suivantes. Le taux tombe à 55% en cas d’aménagement et à 45% pour les peines alternatives à la prison.
Que proposez-vous ?
Tous les financements étant absorbés par le bâti, les alternatives à la prison sont de faible qualité : pour atteindre les critères du conseil de l’Europe – un conseiller d’insertion et de probation pour cinquante dossiers – il faudrait doubler le nombre de nos conseillers. Aujourd’hui, ils ne connaissent pas bien les personnes qu’ils accompagnent et sont dans le contrôle.
Il faut aussi réviser notre politique pénale et ériger la probation en peine principale pour plusieurs délits. Actuellement, la prison est la peine de référence pour toutes les infractions et ses alternatives, considérées comme des « sous-peines », ne sont pas prises au sérieux. Si les 22 000 condamnés à moins deux ans bénéficiaient d’un aménagement de peine, le problème de la surpopulation disparaîtrait !
Construire des prisons est-il spécifiquement français ?
L’Allemagne ou les pays scandinaves ont décidé de stopper les constructions. Cela demande un courage politique que n’ont pas nos représentants. En outre, la France en reste à l’idéologie, pointant le « laxisme » des alternatives à la prison sans prendre en compte la réalité du terrain, qui montre, par exemple, que l’aménagement de peine est le meilleur moyen de prévenir la récidive. Les politiques instrumentalisent le sujet au détriment du débat sur la prison.
Propos recueillis par Félicité de Maupeou