« 20% des centres commerciaux sont situés dans les centres urbains »
Gontran Thüring, délégué général du CNCC
Quel rôle jouent les centres commerciaux dans la situation du commerce de centre-ville ?
Il faut se garder d’une analyse trop rapide consistant à opposer les centres commerciaux et l’offre commerciale de centre-ville. Rappelons que 20% de l’ensemble des centres commerciaux sont situés dans les centres urbains.
Ils y jouent de fait un rôle de « locomotives » pour les commerces qui les environnent. On a pu le constater dans des villes comme Valence, Annecy, Valenciennes ou Aix-en-Provence, etc. Leurs tailles permettent d’accueillir des enseignes telles que Zara, H&M ou la Fnac qui ont besoin d’importantes surfaces et qui, sans elles, auraient des difficultés à trouver des locaux adaptés dans le cœur des cités.
Le commerce de périphérie fait souvent office de bouc émissaire.
Par ailleurs, le commerce de périphérie fait souvent office de bouc émissaire en étant accusé d’être le principal responsable de la dévitalisation de l’offre commerciale de centre-ville, ce que nous réfutons.
Une étude récente du Procos démontre que les communes avec un centre-ville attrayant sont aussi celles où il existe un commerce périphérique dynamique et complémentaire. Une autre étude de l’Institut pour la Ville et le Commerce classe le commerce périphérique comme le dernier critère responsable de la désaffectation des centres-villes.
Quels sont les facteurs qui expliquent cette désaffection ?
En termes d’accessibilité, le développement des secteurs piétonniers est certes une bonne chose, mais exige, en contrepartie, un réseau de transports en commun efficace et des capacités de stationnement suffisantes. Soulignons que dans des pays comme la Grande-Bretagne ou les Pays-Bas, on n’hésite pas à construire des parkings en superstructure, bien intégrés dans l’environnement et qui coûtent quatre à cinq fois moins cher que des parkings souterrains.
Mais on ne peut pas non plus ignorer le développement de l’habitat en périphérie, qui justifie des besoins en services publics et privés, dont bien évidemment des commerces.
Les politiques des collectivités sont-elles à la hauteur de l’enjeu ?
Nous avons récemment effectué un tour de France pour rencontrer plusieurs élus. Ils reconnaissent souvent ignorer les spécificités du commerce et de son développement. Il est donc de notre responsabilité de faire preuve de pédagogie en démontrant le bénéfice des expériences réussies.
A quoi devraient ressembler les centres commerciaux de demain ?
Ils doivent s’inscrire sans doute dans des opérations morphologiquement multifonctionnelles, associant commerces, loisirs, bureaux, logements, etc. et saisir l’opportunité de l’existence de friches industrielles, militaires ou même… commerciales.
L’opération de la promenade Sainte-Catherine sur le site des anciens locaux du journal Sud Ouest, au centre de Bordeaux, en est une parfaite illustration. Un autre exemple en cours de réalisation est le programme « Issy Cœur de Ville », à Issy-les-Moulineaux.
Toutefois, le commerce ne peut rétablir le dynamisme d’un centre-ville à lui seul. Il faut, pour les élus concernés, faire preuve d’une volonté politique ambitieuse de façon à dynamiser l’ensemble des facteurs susceptibles de renforcer l’attractivité du cœur de leurs cités.
Propos recueillis par Jean-Marie Constans