La gentrification, une montée en gamme résidentielle
Ce néologisme de gentrification a fait son apparition en France au milieu des années soixante. Cet anglicisme est désormais entré dans le langage courant des sociologues et des urbanistes pour désigner tout ce qui concourt à ce phénomène de l’embourgeoisement urbain et en premier lieu, celui des centres-villes.
La gentrification peut résulter d’une politique délibérée de la ville ou bien d’un mouvement spontané lié à un nouvel apport de population. Cette transformation passe par la revalorisation du bâti, la rénovation des logements anciens, ou des opérations de démolition-reconstruction, dans la logique d’une montée en gamme socio-économique. La gentrification gagne du terrain dans les grandes villes et les métropoles.
Les opérations de requalification des quartiers qui en ont fait l’objet, ont renforcé leur attrait. Ces zones résidentielles ont séduit des populations que le haut niveau de revenus a aidé à s’y loger malgré l’inflation des prix de l’immobilier.
Ce phénomène de gentrification porte cependant sur des populations aux tranches d’âge souvent élevées qui reviennent en centre-ville pour bénéficier des nombreux services qu’elles ne trouvent pas en lointaine périphérie. Le plus souvent, ce retour en milieu urbain s’opère grâce à la cession de leur domicile antérieur.
Néanmoins, pour les villes moyennes, confrontées au problème de plus en plus aigu de la dévitalisation de leur centre, la réalité demeure sensiblement différente. Rares sont les élus, en effet, qui se réfèrent explicitement à ce concept de gentrification. Dans les anciennes villes industrielles de Grande-Bretagne, au contraire, le terme et cette stratégie d’urbanisme sont clairement assumés.
Attirer les classes moyennes
L’évolution qualitative qui sous-tend toute politique de requalification se fond alors, de manière plus mesurée, dans la notion de mixité sociale. L’idée directrice est d’éviter que le réaménagement du tissu urbain aggrave la ségrégation socio-économique des populations. Ainsi, à Bayonne, une vaste opération a été lancée dans le centre, dans le cadre du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD).
L’objectif était d’attirer des classes moyennes dans un secteur où plus de huit habitants sur dix sont éligibles au logement social. Mais cette démarche se heurte parfois à la réalité locale du marché du logement. A Saint-Etienne, une trop grande vacance des logements – 9 000 sur un stock de 90 000 –, freine une relative gentrification qui serait pourtant souhaitée par la municipalité.
La réussite d’une opération de revitalisation résidentielle qualitative exige une stratégie multifactorielle, car les causes de dévitalisation sont multiples.
La gentrification concerne, en premier lieu, les centres-villes.
L’exemple d’Annecy témoigne de la réussite d’une politique volontariste mise en œuvre dès la fin des années quatre-vingt. Le projet d’urbanisme retenu a consisté à mettre en valeur le patrimoine historique, à développer l’accueil touristique et des activités liées aux sports d’hiver.
Les efforts de la municipalité ont aussi porté sur le renforcement et le développement des commerces, et la réhabilitation d’un périmètre historique d’une vingtaine d’hectares représentant 400 immeubles, 2 000 logements et 5 000 habitants.
Entre 1999 et 2011, Annecy a ainsi pu enregistrer une croissance de plus de 10% de sa population, avec plus de 9 300 habitants vivant en centre-ville, et une part de cadres et de professions supérieures passée de 7,9 à 11%.
Jean-Marie Constans