L’avenir incertain de la stratégie nationale IA lancée en mars dernier
Issue d’une consultation express de plusieurs centaines d’experts français, une stratégie nationale en intelligence artificielle a vu le jour en mars dernier, in extremis avant la fin du quinquennat. Les objectifs sont fixés, mais que deviendront-ils dans la nouvelle mandature ?
«Le secrétaire d’Etat au numérique me proposera dans les trois mois une méthode permettant d’associer les meilleurs spécialistes de ce domaine à la définition d’une stratégie nationale pour l’intelligence artificielle » annonçait début juillet le Premier ministre Edouard Philippe lors de son discours de politique générale.
Or cette stratégie existe déjà. Présentée le 21 mars 2017 à la Cité des sciences à François Hollande, elle s’inspire de la cinquantaine de recommandations des 17 groupes de travail réunis pendant deux mois à l’initiative du gouvernement, entre janvier et mars 2017.
Si sa mise en application sera reportée, Mounir Mahjoubi devrait sûrement s’en inspirer. Voici quelques unes de ses propositions phares.
Soutenir plus efficacement la recherche
Première priorité : la recherche. D’ici fin 2017, l’ensemble des dispositifs publics de soutien à l’innovation devront inclure l’IA dans leurs priorités selon cette stratégie, qui prévoit aussi la création d’un centre interdisciplinaire pour l’intelligence artificielle grâce à un consortium public-privé.
En outre, le troisième programme d’investissement d’avenir (PIA) devrait financer le lancement d’un nouveau projet mobilisant les institutions de recherche pour « identifier, attirer et retenir » les meilleurs talents en IA dans l’Hexagone.
Enfin, pour affirmer le leadership français, la stratégie nationale de mars dernier stipule que la France devrait coordonner un programme européen de recherche d’un genre spécifique : un FET (future and emerging technologies) flagship, c’est-à-dire un projet de recherche de long terme, doté d’un budget d’au moins 1 milliard d’euros, cofinancé par l’UE. Ce flagship se concentrerait sur l’IA.
Améliorer le lien entre recherche et industrie.
Le plan France IA propose de créer des plateformes de rencontre sur lesquelles PME et start-up, créatrices d’innovations mais qui manquent de visibilité, mettraient à disposition leurs technologies pour qu’elles soient testées par les grandes entreprises intéressées.
Le troisième PIA devrait financer un projet pour retenir les talents en IA.
En parallèle, un appel à projets devrait être lancé avant la fin de l’année afin de créer des plateformes de partage de données, dont les entrepreneurs français manquent cruellement.
Autre nerf de la guerre : le financement. L’objectif affiché est d’investir d’ici cinq ans 25 millions d’euros de ressources privées et publiques (de Bpifrance, par exemple) dans chacune des 10 start-up françaises les plus prometteuses.
Créer un climat de confiance
« La France doit être pionnière dans la définition d’un cadre novateur, protecteur des libertés et des utilisateurs », préconise aussi la stratégie, appelant, par exemple, à la création d’un schéma de certification du niveau de robustesse ou de fiabilité d’une IA.
Autre élément important : les conclusions du débat éthique sur les algorithmes confié à la CNIL par la loi pour une République numérique, devront être rendues publiques en octobre 2017.
Pour créer un climat de confiance, le grand public doit également être davantage sensibilisé en acquérant dès le plus jeune âge « certaines compétences et concepts de base sous-jacents » à l’IA. Cela pourrait passer par une augmentation des heures de cours d’informatique, par exemple.
La stratégie dessinée en mars préconise également que soient financés des campagnes de communication et des lieux d’exposition de projets pilotes.
Enfin, il est demandé à France Stratégie de lancer une concertation sur une question qui suscite beaucoup d’inquiétudes : les effets de l’IA sur l’emploi.
Félicité de Maupeou