Certains territoires sont plus exposés aux risques routiers
En 2016, les routes de plusieurs régions ont été plus meurtrières que l’année précédente. Les accidents mortels seraient-ils aussi liés au niveau de vie des automobilistes ?
Le pourcentage d’accidents par région dépend de multiples facteurs : l’âge de la population française, la densité du territoire, la typologie du réseau routier, sa situation géographique par rapport aux maillages européens de fret routier, de même que la variété des paysages (bords de mer et montagne) et ses zones touristiques, sans oublier le climat.
Ainsi, les Hauts-de-France, plaque tournante du transport vers la Belgique, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, affichent un taux de mortalité en hausse depuis plusieurs années. C’est la seule région à enregistrer un taux supérieur à son niveau de 2010.
Autre point noir, les Territoires d’outre-mer où le taux de mortalité, en 2016, n’a pas bougé depuis 2010.
La Corse, avec ses routes escarpées, dénombre plus de 100 victimes en six ans. Quant au département des Alpes-de-Haute-Provence, avec 26 victimes l’année dernière, il frise le record de 2011 qui a compté 28 décès. Dans le Vaucluse, le taux de mortalité a augmenté de 52%, en un an.
Hécatombe aussi en Bretagne, où 175 personnes ont trouvé la mort sur les routes en 2016, soit une augmentation de la mortalité de 20% par rapport à l’année précédente.
Dans le Grand-Est, les routes du Doubs ont été particulièrement meurtrières, comme dans les Ardennes, où l’on a déploré 17 tués en 2016, soit une hausse de 89%.
Le tableau est moins sombre pour le Centre-Val-de-Loire, avec une baisse du nombre de tués (-7%). L’Occitanie, la Nouvelle-Aquitaine ont aussi connu un léger progrès.
Y a-t-il un lien entre inégalité territoriale et sociale ?
Sommes-nous tous égaux face à la route ?
Chaque année, un organisme européen indépendant, l’Euro NCAP publie la liste des voitures ayant obtenu les meilleurs résultats au crash-test, cette simulation de choc qui, pour chaque modèle de véhicule, mesure la protection des occupants, des piétons et les aides à la sécurité.
En 2016, la palme a été décernée à la nouvelle Toyota Prius. Ce modèle a enregistré des scores de 92% en matière de protection des adultes, 82% pour les enfants, 77% pour les piétons et 85% pour les aides à la conduite, le tout pour un prix de vente autour des 30 000 euros.
Au-delà de l’inégale sûreté des véhicules, la mortalité routière s’explique du fait de l’aménagement urbain.
Les Hauts-de-France affichent un taux de mortalité en hausse depuis plusieurs années.
Pour le chercheur Matthieu Grossetête, « l’embourgeoisement des centres-villes relègue les classes populaires toujours plus loin du bassin d’emploi ; elles sont plus nombreuses à emprunter quotidiennement les routes secondaires, plus dangereuses, tandis que les automobilistes plus aisés circulent surtout en ville ou sur autoroute, qui est l’infrastructure la plus sûre, mais aussi la seule qui exige un péage ».
Le sociologue Nicolas Renahy, en observant un village de Bourgogne, a constaté un autre phénomène : les jeunes qui peinent à trouver un emploi adopteraient davantage des comportements à risque pour compenser le manque de valorisation sociale. Face à un déficit d’estime de soi, le véhicule deviendrait un espace de virilité, un moyen de s’affirmer par la vitesse.
Or, comme pour les accidents, le chômage ne frappe pas toutes les régions avec la même ampleur. Selon l’Insee, les populations qui ont le plus souffert du chômage entre 2008 et 2013 sont les ouvriers, les employés, les jeunes, les personnes sans diplôme et les parents isolés.
En avril 2017, c’est dans le nord que les chômeurs sont les plus nombreux. Pour l’année 2016, les départements d’outre-mer atteignent, eux, des taux supérieurs à 20%.
Aujourd’hui, aucune statistique n’établit un lien de cause à effet entre le niveau de vie et le nombre d’accidents sur les routes, ce qui ne veut pas dire qu’il n’existe pas.
Audrey Chaussalet