Les hôpitaux commencent à exporter leur savoir-faire
Votée en 2015, la loi Macron permet aux CHU de créer des filiales commerciales pour répondre aux appels d’offres à l’étranger. Mais la concurrence est rude.
Le marché mondial de l’hôpital bénéficie de tendances de fond favorables : apparition d’une classe moyenne dans les pays en développement, moyens financiers alloués à la santé par les bailleurs de fonds internationaux, comme la Banque mondiale. Ce marché devrait atteindre 37 milliards de dollars en 2018 et sa croissance annuelle s’établir à 11% dans les dix ans à venir, selon les estimations de Transparency Market Research.
Pourtant, rares sont les établissements français présents à l’étranger en raison d’un Code de la santé publique stipulant que « l’objet principal des établissements publics de santé n’est ni industriel, ni commercial ». La loi Macron pour la croissance et l’activité, votée en 2015, a fait évoluer les mentalités.
Une filiale internationale pour l’AP-HP
Avec la possibilité de créer des filiales commerciales, les CHU peuvent désormais participer aux appels d’offres à l’étranger, pour construire des hôpitaux (en partenariat avec de grands groupes de BTP), les gérer ou encore pour assurer la formation des personnels médicaux.
Construction d’hôpitaux, gestion, formation… la demande est multiforme.
Grâce à cet assouplissement juridique, ils vont pouvoir commercialiser leur savoir-faire et valoriser leur expertise sur la scène internationale.
L’AP-HP a d’ailleurs créé une filiale internationale l’année dernière pour répondre aux demandes multiformes qu’elle reçoit. Elle a, en effet, été sollicitée pour des projets variés – hôpitaux mère-enfant, Samu, aide à l’ouverture d’un établissement… – dans de nombreux pays (Arabie saoudite, Sénégal, Birmanie, Laos ou encore Tunisie).
La France doit combler son retard
Malgré cette avancée notable, Philippe Domy, ancien président de la Conférence des directeurs généraux de CHU, regrette que les agences régionales de santé (ARS), qui ne sont pas assez expertes à l’international, aient un rôle important dans ce mécanisme. De fait, le directeur général de l’ARS doit donner à l’hôpital l’autorisation administrative d’ouvrir une filiale.
Pour saisir les opportunités qui se présenteront, les CHU comptent, aujourd’hui, sur Expertise France, l’agence lancée en 2015 sous l’égide du ministère des Affaires étrangères. Les professionnels du secteur attendent d’elle qu’elle repère les marchés et fédère les initiatives.
Le défi, pour les différents intervenants français (grands groupes de BTP, PME, CHU de taille moyenne), va donc consister à mutualiser leurs compétences afin de structurer des projets internationaux, condition sine qua non pour peser face à des concurrents déjà établis. Des acteurs américains, anglais, autrichiens ou encore italiens sont, en effet, présents de longue date sur ces marchés, et sont donc rompus à ce genre d’appels d’offres.
Marianne Di Meo
INFO +
Un hôpital « clés en main » de 200 lits était estimé à 40 millions d’euros en 2010 en Afrique. Ce continent aurait besoin d’au moins 550 000 lits supplémentaires d’ici à 2020, selon le magazine « Jeune Afrique ».