L’hôpital public peut-il être une entreprise comme les autres ?
Les établissements de santé peuvent-ils s’affranchir des règles d’une gestion saine et efficace, au motif qu’ils assurent une mission de service public ? Le débat est ouvert.
Plans d’économies pour maîtriser les déficits, nouvelles méthodes de management et suppressions de postes, course à la rentabilité dans le sillage de la T2A : de plus en plus, l’hôpital public est sommé par les autorités de santé d’agir comme une entreprise privée, au grand dam des syndicats.
Les partenaires sociaux critiquent vertement l’approche libérale des dernières réformes, qu’il s’agisse de la loi Bachelot de 2009, dite HPST (« Hôpital, patients, santé et territoires ») ou, plus récemment, de l’instauration des groupements hospitaliers de territoire (GHT).
1 € dépensé par les CHU du Grand Ouest, c’est 2 € pour l’économie du territoire.
Les syndicats jugent cette approche incompatible avec les missions de service public et mettent en garde contre les répercussions de ces mesures sur la qualité des soins.
Plus nuancé, l’économiste Claude Le Pen estime que « l’hôpital ne doit pas être soumis à des règles de profitabilité ; pour autant, il n’a pas tous les droits au nom du service public et, notamment, pas celui d’être inefficace et de perdre de l’argent ».
Le modèle de l’hôpital doit donc évoluer afin de devenir plus réactif et efficace : « Avec l’essor de l’ambulatoire, il va perdre sa dimension de lieu d’hébergement pour devenir une plateforme technique de soins, prévoit Claude Le Pen ; par ailleurs, le tissu hospitalier va évoluer, avec des structures plus souples et plus diversifiées, spécialisées en fonction des différentes missions à assurer : urgences, pathologies chroniques, soins palliatifs… »
L’hôpital, un atout économique pour un territoire
Le regard que l’on porte sur l’hôpital doit changer ; il ne peut plus être considéré uniquement comme un centre de coûts pour la communauté.
Le groupement des hôpitaux universitaires du Grand Ouest (CHU d’Angers, Brest, Nantes, Rennes, Tours et le CHR d’Orléans) a récemment mis en évidence les retombées économiques de son activité – liées aux salaires, aux achats, aux investissements et aux impôts locaux – sur le territoire : « Chaque euro dépensé directement par les CHU entraîne le reversement de deux euros dans l’économie du Grand Ouest », pointe Cécile Jaglin-Grimonprez, déléguée générale du groupement.
Marianne Di Meo
Acheter groupé pour économiser
Avec 18 milliards d’euros déboursés chaque année, les achats représentent le deuxième poste de dépenses des hôpitaux, après la masse salariale. Pour mieux maîtriser les coûts, un plan national de performance des achats hospitaliers, baptisé Phare*, a été lancé en 2011 par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS).
Dans ce cadre, UniHA, le réseau coopératif d’achats groupés de 56 établissements hospitaliers publics français joue un rôle de premier plan. En 2016, il a fait économiser à ses membres 124,37 millions d’euros, pour un volume d’achats de plus de 3 milliards d’euros (produits médicaux ou d’hygiène, fourniture d’énergie…).
Marianne Di Meo
* Performance hospitalière pour des achats responsables.