Affirmons les valeurs fondatrices de l’hôpital et sa modernité
Depuis quelques décennies, l’hôpital est confronté à une question de nature essentielle qu’il n’a pas vraiment su régler : comment concilier son rôle historique, traditionnel de facteur de lien social, de lieu d’humanité et d’accueil empreint d’un souci permanent de prendre soin de la personne et son rôle de lieu de haute technologie, de savoir pour la prise en charge de toutes les pathologies ? Comment concilier haute technologie et fonction humaine et sociale ?
Les progrès scientifiques, médicaux et technologiques ont fait basculer notre système hospitalier dans l’excellence. Diagnostics et thérapeutiques bénéficient des avancées spectaculaires au service des patients, avec la volonté d’améliorer la qualité et la sécurité des soins et d’allonger l’espérance de vie.
L’organisation de l’hôpital, son management et la structure de son environnement suivent cette tendance vers une plus grande performance technique.
L’environnement économique et financier renforce ce processus et peut, si l’on n’y prend pas garde, éloigner la dimension humaniste du soin et mettre de côté les valeurs fondatrices de solidarité, d’engagement et de respect de l’hôpital.
Ce décalage croissant entre ces valeurs, partagées par les professionnels hospitaliers, et la réalité quotidienne faite de tensions internes, de concurrence entre les équipes et entre les établissements, de sentiment de ne pas faire pleinement son travail entraîne une perte de sens et une souffrance au travail.
S’il faut se féliciter de ces progrès et encourager le développement et l’accès pour tous aux innovations thérapeutiques et technologiques, il me semble nécessaire de rappeler que ces avancées dans le champ du soin sont au service de la personne soignée.
Il faut également affirmer que les progrès en matière d’organisation et de management sont au service de la première ressource de l’hôpital : les moyens humains.
Un hôpital disposant des plus hautes technologies, des compétences d’excellence, des organisations et du management les plus performants au plan économique et financier, mais déshumanisé à l’égard de ses propres ressources humaines et des personnes qu’il prend en charge, n’est pas un hôpital. Certains pourront dire que c’est une entreprise performante qui dispense des soins, j’affirme que ce n’est pas un hôpital.
L’hôpital doit réaffirmer ses valeurs humanistes, en particulier de solidarité et de respect de l’autre, pour mieux poursuivre le développement du progrès. Cela peut se traduire par des démarches participatives dans le domaine du soin, une meilleure information et la prise en charge globale des patients.
On ne peut pas améliorer la qualité des soins et viser une plus grande efficience sans une politique d’amélioration de la qualité de vie au travail. Une bonne qualité des soins et une bonne efficacité constatées et reconnues du fait de l’implication des professionnels permettent d’améliorer leur qualité de vie au travail. Enfin, qualité des soins et qualité de vie au travail conjuguées produisent de l’efficience.
La recherche de l’équilibre entre ces trois volets devrait guider toute politique hospitalière en matière d’organisation des soins et de financement du système. Leur mise en œuvre dans les établissements permet d’intégrer les valeurs de solidarité et de respect tout en développant les innovations et en produisant une plus grande efficience.
C’est aussi reconnaître que l’hôpital n’est ni une entreprise industrielle ou commerciale ni une administration classique, mais un lieu où des hommes et des femmes disposant de grandes compétences et de moyens techniques sophistiqués accueillent et prennent en charge d’autres personnes humaines dans des situations de santé complexes ou d’urgence.
C’est ainsi affirmer la volonté de construire l’hôpital de demain