Préemption et réquisitions : fausses bonnes idées ?
Les pouvoirs publics envisagent régulièrement de recourir à des moyens coercitifs pour créer des logements supplémentaires. Coups de communication ou réelles menaces ?
Les pouvoirs publics semblent bien résolus à tout mettre en œuvre pour pallier le manque de logements sociaux. Y compris à appliquer, de manière plus systématique, les prérogatives que les lois SRU et Alur ont conférées aux préfets en matière de préemption de terrains et d’immeubles dans les communes carencées.
La réquisition de logements vacants n’a jamais donné de résultats probants.
L’an dernier, la ville d’Ormesson-sur-Marne, qui compte seulement 1,8% de logements sociaux au lieu des 25% imposés par la loi SRU, a ainsi fait les frais d’une campagne de communication du gouvernement. Le ministre de la Ville, Patrick Kanner, avait alors fait le déplacement pour annoncer la préemption par l’Etat d’un terrain sur lequel seraient construits près de 200 logements sociaux.
Un levier de négociation avec les collectivités locales
En pratique, le recours au droit de préemption se fait à « doses homéopathiques », nuance Alain Régnier, président de Solidarités nouvelles pour le logement : « Nous y sommes cependant très favorables, car c’est un levier de négociation avec les collectivités locales, afin qu’elles définissent des objectifs plus vertueux pour leurs programmes locaux de l’habitat (PLH) et leurs plans locaux d’urbanisme (PLU). » Autre piste : la réquisition de logements vacants par les autorités publiques. Ce mécanisme, qui date de 1945, avait initialement été prévu pour remédier aux difficultés de logement causées par les destructions de la Seconde Guerre mondiale. La procédure a bien été modernisée depuis, mais elle reste corsetée dans un cadre juridique strict, ce qui rend son application difficile. Employée à plusieurs reprises – par Marie-Noëlle Lienemann en 2001, et plus récemment, fin 2012, par Cécile Duflot –, elle n’a toutefois jamais donné de résultats probants : « Les réquisitions étaient plus efficaces lorsqu’elles portaient sur des immeubles entiers détenus par les investisseurs institutionnels, fait remarquer Alain Régnier ; la réquisition logement par logement auprès de particuliers est plus compliquée à mettre en œuvre ; cela reste néanmoins un outil intéressant s’il s’inscrit dans un continuum de réponses pour développer une véritable politique en matière d’offre de logements. » Le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées (HCLPD) estime, de son côté, que la réquisition représente un instrument dissuasif dont l’application s’avère nécessaire dans certaines situations de vacance inacceptables, en cas de rétentions spéculatives ou lorsque l’on constate une volonté délibérée de laisser un bien inoccupé…
INFOS +
En pratique, les pouvoirs de réquisition des maires sont limités, car la jurisprudence administrative fixe des conditions très restrictives : uniquement en cas d’urgence et à titre exceptionnel, lorsque le défaut de logement de la famille est de nature à apporter un trouble grave à l’ordre public.