Une réussite appelée à perdurer dans tous les secteurs d’activité
Soutenue par de nouvelles habitudes de consommation et la transition numérique, l’économie collaborative va continuer à gagner du terrain. Tous les secteurs d’activité deviennent ses territoires de conquête.
Dopée par le besoin de trouver des solutions à la crise, la consommation collaborative est-elle menacée par le retour à la croissance ? Rien n’est moins sûr. « Les pratiques collaboratives semblent avoir un effet d’entraînement, amenant le consommateur à tester le modèle dans d’autres secteurs », relève le député Pascal Terrasse dans son rapport sur l’économie collaborative. « L’économie de partage se développe à une vitesse grand V. Nous sommes passés d’un simple titre accrocheur à un choix de consommation privilégiée des nouvelles générations Y et Z », confirme Jean-François Marti, responsable du PwC Experience Center, au terme de l’étude menée en Europe.
Vers des synergies avec l’économie conventionnelle
Transport, hébergement, services à la personne, finance, services aux entreprises, santé ou encore énergie : tous les secteurs sont aujourd’hui gagnés par les pratiques collaboratives. Le rapport publié par le Pipame ne recense pas moins de 22 segments de marché concernés. Et de nouveaux services émergent chaque jour. L’un des derniers en date est proposé par la start-up Memory Forever, qui met en relation des particuliers pour l’entretien et le fleurissement des sépultures, un premier pas vers l’ubérisation de certaines activités des entreprises de pompes funèbres.
Les synergies entre l’économie collaborative et l’économie classique vont progresser.
Les acteurs conventionnels ont compris qu’ils ne peuvent ignorer cette montée en puissance. Ils nouent des partenariats ou proposent eux aussi des services collaboratifs. Leroy Merlin est ainsi entré en 2015 au capital de Frizbiz, un site qui permet à des particuliers de proposer des prestations de bricolage. « Les synergies entre l’économie collaborative et l’économie classique vont progresser », prévoit le rapport Terrasse. En exemple, il cite la stratégie du groupe MAIF, qui investit dans des plateformes (transport, logement, services…) et multiplie les partenariats dans le cadre de son activité d’assureur, mais qui a aussi créé un fonds d’investissement doté de 125 millions d’euros dédiés à l’économie collaborative, au numérique et à l’innovation.
Une réponse aux aspirations des consommateurs
Pour les chercheurs du Credoc, « les raisons de la réussite actuelle de l’économie collaborative en France sont appelées à perdurer ». Ils mettent en avant la diffusion des technologies de l’information, les contraintes budgétaires des ménages et le sentiment de répondre aux problèmes environnementaux croissants. Sur ce dernier point, l’économie du partage est porteuse de solutions. Durabilité des produits partagés, optimisation du transport des biens et des personnes et, donc, réduction de l’empreinte écologique sont d’ailleurs des arguments mis en avant par les plateformes collaboratives. L’Iddri (Institut du développement durable et des relations internationales), qui s’est intéressé au bilan environnemental du partage, apporte toutefois un bémol, relevant que « les modèles de partage peuvent être le vecteur d’une consommation durable comme celui d’une hyperconsommation », avec l’accès à des biens que l’on n’aurait jamais achetés. Le potentiel est pourtant bien là : « Si les modèles de partage étaient utilisés au mieux, c’est jusqu’à 7% du budget et 20% des déchets des ménages qui pourraient être économisés. »
Valider le modèle économique
« Au cours des dix prochaines années, l’économie collaborative pourrait bien devenir LE modèle de performance dans une Europe qui cherche la croissance », analyse Jean-François Marti. Le montant des transactions des cinq principaux secteurs concernés (transport, hébergement, services à la personne, finance et services aux entreprises) pourrait être multiplié par 20 en dix ans et passer de 28 milliards d’euros aujourd’hui à 570 milliards en 2025. Les services à la personne devraient bénéficier de la plus forte croissance, avec une hausse de chiffre d’affaires qui atteindrait 50% par an jusqu’en 2025. Il n’en reste pas moins que malgré des levées de fonds par dizaines de millions, des licornes comme BlaBlaCar ne sont pas encore profitables, quant à Take Eat Easy, il a carrément déposé le bilan. Dans les territoires, des entreprises plus modestes, malgré des services de proximité qui répondent aux besoins des consommateurs, ont du mal à trouver un équilibre économique. Atteindre la taille critique pour s’imposer en leader fait partie de la stratégie des start-up. On peut donc s’attendre à des mouvements de concentration dans le futur.
DE WIKIPEDIA AUX MOOC
- Voilà plus de quinze ans que l’américain Wikipédia a révolutionné le savoir encyclopédique sur le mode collaboratif. Il fait partie des 10 sites les plus visités au monde.
- L’Ecole 42 forme des jeunes aux métiers du numérique. Elle a banni les cours magistraux pour privilégier l’apprentissage participatif.
- Des plateformes comme Kokoroe proposent des cours particuliers et collectifs, allant de la cuisine aux langues étrangères, en passant par le marketing ou la musique, sur la base d’échanges en pair à pair entre experts et passionnés.
- Les MOOC rendent accessibles des cours dans toutes les disciplines, avec les meilleurs spécialistes. L’Institut Mines-Télécom a même conçu un programme de cinq semaines sur la plateforme FUN (France université numérique) pour comprendre cette économie.