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L’Europe à l’épreuve de ses nations

05/10/2016
  • Les tribunes de Jean-Michel Arnaud
Huffington Post

Cela avait peut-être échappé à un continent promis à la concorde et à l’Union « sans cesse plus étroite », mais le nationalisme n’est pas mort. Le Brexit est la première secousse politique d’ampleur qui vient nous le rappeler. Ce vote reflète la réalité crue d’une Grande-Bretagne qui se refuse à partager un destin commun avec ses voisins, à se laisser dicter ses lois et souhaite reprendre le contrôle de ses frontières. Un nationalisme de clocher qui prospère chez les classes populaires et dans les zones rurales. Un discours qui séduit dans tous les pays et fait également le succès de Donald Trump outre-Atlantique.

Ces nouveaux nationalismes ne sauraient être assimilés à ceux de la première moitié du XXème siècle dont les déflagrations ont produit tant de douleurs et profondément marqué le continent européen. Point de volonté de grandeur ou de visée hégémonique fondées sur une supposée supériorité culturelle ou raciale. Point de revanche de la géographie sur l’histoire. Ce n’est plus un nationalisme de conquête qui est à l’œuvre, mais un nationalisme de repli voire de survie, qui trouve son origine dans les bouleversements causés par la mondialisation et entretient la nostalgie d’un Etat-nation homogène, souverain et mercantile. Il est avant tout un populisme.

Le politologue Dominique Reynié parle à son sujet d’un populisme patrimonial qui prend essentiellement deux formes. La défense d’un patrimoine matériel d’un côté : une protestation contre les difficultés économiques, la désindustrialisation et la disparition d’un certain type d’activités traditionnelles. La conservation d’un patrimoine immatériel de l’autre : un sentiment d’insécurité lié au mélange et à la dissolution des cultures qui se manifeste surtout dans le rejet de l’immigration. Crise économique et crise des réfugiés n’ont fait qu’aggraver le phénomène pour le porter aux niveaux que nous connaissons.

Cette perte de repères se trouve renforcée par le sentiment d’une perte de contrôle de son destin dans un monde où les Etats sont aux prises avec des flux qui les dépassent et d’autres acteurs qui s’affirment, en premier lieu les organisations internationales. Rien d’étonnant à ce que l’Union Européenne soit la première victime des frustrations du peuple britannique. Cet aspect des choses explique que de nombreux pays par ailleurs en excellente santé économique, comme le Danemark, l’Autriche ou la Suisse voient aussi le populisme nationaliste prospérer. Ce populisme redéfinit les clivages politiques entre ceux que le sociologue Hanspeter Kriesi appelle les « gagnants » et les « perdants » de la mondialisation. La nouvelle opposition entre mondialistes et patriotes que défend par exemple Marine Le Pen vise précisément à prendre position dans ce clivage et à se placer comme figure unique de la défense des intérêts du peuple en face de la caste dirigeante.

Ces demandes de sécurité et de souveraineté exploitées par les populistes n’ont rien d’infamant. La mondialisation, la chute des barrières commerciales et l’ouverture des frontières ont apporté d’immenses bénéfices au monde et à l’Europe, tant en matière d’accroissement des richesses que de multiplication des possibilités. Mais elles ont indéniablement fait des perdants dans certaines régions, les anciennes zones industrielles ou rurales, et chez les populations les moins outillées pour exploiter ce nouveau paradigme. Sans remettre en cause la dynamique en cours, l’Europe doit donc consentir à bâtir les protections nécessaires et à défendre sa souveraineté. Quel pays peut espérer contrôler seul les flux migratoires, régler les questions climatiques et réguler les flux financiers ? Au souverainisme national étriqué et inefficace des populistes, les européens doivent répondre par une souveraineté partagée et efficace. A leur protectionnisme rétrograde et leur rejet de l’autre, ils doivent opposer une Europe ouverte, protectrice et soucieuse de réciprocité dans les échanges.

 

L’enjeu pour l’Europe est de créer un sentiment d’appartenance à un espace de solidarité aujourd’hui incarné par chaque pays. Un sentiment qui rend les injustices et les sacrifices supportables. Celui-ci peut avoir un fondement historique comme la Nation, ou plus factuel, comme l’instauration d’une paix durable en Europe. Une chose est sûre : les seuls intérêts économiques ne suffisent pas à le justifier.

 

Cette nouvelle montée des nationalismes sera l’un des défis centraux du XXIe siècle européen. Il ne suffira pas d’agiter le spectre de la guerre et des années 1930 pour l’entraver, elle qui charrie son lot d’intolérance et de xénophobie. Ce sont de lointains souvenirs pour des générations élevées dans l’opulence et la paix. Il faut y apporter un traitement politique d’urgence. La guerre n’est pas prête d’éclater, mais les tensions naissantes à l’intérieur de l’Europe peuvent déboucher sur des conséquences inattendues. Ce que ce début de siècle nous a appris, c’est que l’histoire n’avait pas encore décidé de finir.

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