Changement climatique : une urgence pour la France
Avec un gain de 1° degré en un siècle, la France est sévèrement touchée par les risques liés au changement climatique. Tandis que les débats s’éternisent, la situation s’aggrave.
En vingt jours, la canicule de 2003 a tué 15 000 personnes. Après 2050, cet événement extrême aura lieu environ un été sur deux et il sera particulièrement dévastateur dans les villes – où vivent trois Français sur quatre. Plus de sécheresses signifie aussi des feux de forêt plus nombreux et plus difficiles à maîtriser.
Quant aux inondations, elles sont déjà plus fréquentes et plus fortes. Souvenons-nous de la tempête Xynthia en février 2010, qui a tué 47 personnes, et, en octobre dernier, des 20 victimes des inondations dans les Alpes-Maritimes. En tout, plus de 18 millions de personnes et près de 10 millions d’emplois sont aujourd’hui exposés aux débordements de cours d’eau et à la submersion marine. Enfin, l’alternance d’épisodes de sécheresse et de violentes précipitations menace d’exacerber les risques de coulées de boue et de glissements de terrain.
Des risques sanitaires qui sévissent déjà
Les victimes de catastrophe naturelle sont exposées au stress post-traumatique, aux troubles du sommeil ou encore à la dépression. Mais la menace sanitaire du changement climatique va plus loin : de nouveaux maux, cantonnés jusqu’ici aux milieux tropicaux, pourraient faire leur apparition en France. Pour Jean-François Toussaint, cardiologue et président du groupe d’experts du Haut Conseil de la santé publique sur le sujet, « une épidémie de dengue ou de chikungunya en France est non seulement possible, mais est peut-être déjà en train de se produire »*. En 2014, plus de 600 cas de ces maladies ont été identifiés dans le Sud, et la zone d’expansion s’étend vers le nord : tous les ans, deux nouveaux départements sont touchés.
Certaines variétés de fruits pourraient disparaître.
En cause, un environnement devenu favorable au développement du moustique tigre, porteur de ces virus. Il est présent aujourd’hui dans 22 départements, contre 5 il y a cinq ans… L’augmentation des précipitations, des températures et de l’humidité pourrait aussi provoquer la multiplication d’autres maladies infectieuses comme le virus West Nile, la leishmaniose ou la borréliose de Lyme. Plus grave, le paludisme – infection parasitaire mortelle lorsqu’elle n’est pas traitée dans les 24 heures – pourrait réapparaître dans les zones de marais. Hausse des températures et sécheresse sont sûrement déjà responsables d’une croissance des maladies respiratoires et des allergies. Car elles boostent la pollution, accroissent la quantité de pollen et le rendent plus allergisant. Allergies diverses, asthme, rhinites et cancer du poumon devraient proliférer.
Des menaces sur la production alimentaire
Quant à l’agriculture, elle est directement menacée par les sécheresses, les inondations ou les autres catastrophes naturelles. La canicule de 2003 a ainsi entraîné une perte de rendement de 20 à 30%. Mais les sécheresses ont aussi un impact sur la qualité des cultures : absorbant sur plusieurs années les hausses de températures, les arbres fruitiers et les vignes s’affaiblissent progressivement et donnent des produits de moins bonne qualité. Idem pour les céréales, dont l’amidon perd en qualité au fur et à mesure que la chaleur monte. Résultat : les prix baissent. Et c’est parfois toute une économie locale qui est menacée. Comme à Montpellier où, en trente ans, la région est passée d’un climat subhumide à un climat semi-aride, entraînant un décalage des cultures vers le nord et une perte de production de 11%. Le changement climatique pourrait même faire disparaître certaines variétés, comme la clémentine dont l’arôme et le goût acidulé bien particulier dépendent de l’acidité. Car depuis une dizaine d’années, cette acidité diminue sous l’effet du réchauffement des températures, qui enclenche un processus chimique vidant le fruit de son acide nitrique. Au-delà des ressources alimentaires, la biodiversité toute entière est menacée. Quel sera l’impact de la disparition du Marais poitevin et des glaciers alpins, ou du dépérissement de la forêt méditerranéenne sur nos équilibres naturels ? Les débats sont en cours. Ils cherchent également à déterminer si le changement climatique augmente la fréquence des tempêtes, des cyclones et des avalanches, et s’il est responsable de l’amplification du nombre de cancers de la peau – 80 000 nouveaux cas par an en France, soit une hausse annuelle de 7%. Habitants et territoires devront s’adapter. Vous avez dit résilience ?