Canada • Au Canada, le multiculturalisme constitutionnel
Au Canada, le « vivre ensemble » a le visage d’un homme, Pierre-Elliott Trudeau, Premier ministre de 1968 à 1984 – père de l’actuel Premier ministre Justin Trudeau – et instigateur dès 1971 d’une véritable politique d’Etat axée sur le multiculturalisme, dont on estime qu’elle fut une première mondiale. Trudeau était un libéral, conscient de la nécessité de faire évoluer son pays vers davantage d’intégration, un modèle pluriethnique, tout en préservant les particularités d’un modèle biculturel dans lequel le Québec devait conserver toute sa place. En 1973, il crée un ministère en charge du multiculturalisme puis, dix plus tard, la Charte canadienne des droits et des libertés, véritable plaidoyer pour le « vivre ensemble », est inscrite dans la Constitution. Charte qui vise à promouvoir des idéaux de respect, d’égalité et de tolérance, et qui sera renforcée en 2008 par le rapport gouvernemental Bouchard-Taylor qui évoque une « politique préconisant des rapports harmonieux entre les cultures, fondée sur l’échange intensif et axée sur un mode d’intégration qui ne cherche pas à abolir les différences, tout en favorisant la formation d’une identité commune ».
« Identité commune », la formule est forte, elle vise à ce fameux « vivre ensemble » qui n’est pas si évident, même au Canada, et même un demi-siècle après la volonté de Pierre-Elliott Trudeau. En effet, des voix discordantes et critiques se font de plus en plus entendre, qui reprochent à ce « multiculturalisme constitutionnel » de diluer les identités spécifiques ou régionales, au nom d’un universalisme dont certains ne veulent pas. Tout particulièrement au Québec où l’on voit aussi les limites du « vivre ensemble », avec très régulièrement des manifestations en opposition aux lois fédérales sur le multiculturalisme.